Le futur Code de développement territorial – Interview

Nathalie BotonNathalie Boton
Project and legal adviser
2BUILD Consulting

1. Quels seront les changements majeurs apportés par le futur Code du développement territorial ?

Compte tenu de l’ampleur de la réforme, il n’est pas évident de la commenter en quelques mots. Précisons également que le processus législatif est encore en cours, de sorte que le texte est encore susceptible de modifications. L’on peut toutefois déjà épingler certains éléments majeurs.

Le CoDT vise tout d’abord à simplifier les outils d’aménagement du territoire.

Aujourd’hui, outre le schéma de développement de l’espace régional et le plan de secteur au niveau régional, il y a, au niveau communal, des schémas de structure, des rapports urbanistiques et environnementaux, des PCA (plans communaux d’aménagement), mais aussi d’anciens PCA dérogatoires, des PCA révisionnels, etc. La réforme vise à ne maintenir que deux outils au niveau communal : le schéma de développement communal et le schéma d’urbanisation.

De même, les règlements régionaux d’urbanisme sont regroupés dans un guide régional d’urbanisme, tandis que les règlements communaux deviennent des guides communaux d’urbanisme.

Toujours en vue d’une simplification, les procédures d’adoption de ces plans, schémas et guides sont unifiées.

La réforme ambitionne également de simplifier les procédures d’octroi des autorisations et de les accélérer. Ainsi, le délai de décision devient un délai de rigueur : en cas de dépassement de ce délai, le demandeur ne devra plus saisir le fonctionnaire délégué, la demande sera en effet automatiquement considérée comme refusée et il pourra exercer un recours à l’encontre de ce refus.

À côté de ces simplifications, le projet modifie également l’équilibre actuel dans les rôles de la commune et de la région. Ainsi, un avis conforme du fonctionnaire délégué est réintégré pour certains projets d’ampleur, mais le nombre de projets dispensés de cet avis est par ailleurs augmenté. En outre, l’autonomie communale est renforcée par la possibilité, pour la commune, de réviser le plan de secteur de sa propre initiative, au besoin en couplant cette révision à une demande de permis d’urbanisme. Il est également prévu de définir des périmètres « U » (pour « urbain »), au sein desquels les communes pourront substituer un schéma de développement communal au plan de secteur.

Le projet de CoDT comprend une série d’autres modifications qu’il est impossible d’analyser en détails ici. Citons-en néanmoins pour mémoire.

Une consécration de la compétence de la commune pour le tout, dans certains cas où une partie du projet entre, en principe, dans la compétence du fonctionnaire délégué.

Une clarification de la possibilité de vendre sur plan des immeubles dans le périmètre d’un permis de constructions groupées sans avoir besoin d’un permis d’urbanisation.

L’instauration de « réunions de projet » entre le demandeur et les autorités, préalables à l’introduction de la demande, obligatoires pour certains projets d’ampleur.

La confirmation que le délai de péremption du permis est suspendu pendant la durée de la procédure au Conseil d’État.

D’un point de vue plus formel, la structure du CWATUPE va être profondément modifiée. Certaines dispositions seront regroupées ensemble, tandis que d’autres sont subdivisées. Enfin, les numéros d’articles sont dorénavant composés d’une lettre – D pour la partie législative et R pour la partie règlementaire – puis d’un chiffre romain – en fonction du chapitre du code et enfin d’un chiffre arabe (par exemple, article D.IV.55).

2. Comment les outils de planification vont-ils évoluer ?

Les outils de planification vont considérablement évoluer avec cette réforme, dans la mesure où la plupart deviennent des instruments indicatifs.

Ainsi, seuls le plan de secteur et certaines normes du guide régional d’urbanisme (en matière de salubrité, de sécurité, d’acoustique et d’accessibilité par des personnes à mobilité réduite) conservent une valeur règlementaire.

Tous les autres outils, schéma de développement de l’espace régional, guide d’urbanisme régional, schéma de développement communal et schéma d’urbanisation auront une valeur indicative. Les prescriptions des permis d’urbanisation suivent le même sort.

Le CoDT prévoit cependant que tout écart par rapport à ces outils indicatifs devra faire l’objet d’une motivation circonstanciée répondant à des critères bien précis.

Ainsi, la motivation de toute décision s’écartant d’un schéma devra démontrer que le projet ne compromet pas les éléments essentiels du schéma qui le concerne et présente des spécificités qui justifient ces écarts ; respecte, renforce ou recompose le cadre bâti ou les lignes de force du paysage.

3. Quelles sont les perspectives d’avenir pour le décret d’autorisations régionales (DAR) ?

Le DAR, adopté en 2008, avait pour objet de faire ratifier par le Parlement une série de permis, existants et à venir, relatifs à des projets d’importance régionale, principalement en vue de les faire échapper à la compétence du Conseil d’État. Le régime mis en place a cependant été invalidé par la Cour Constitutionnelle en 2012, en raison de sa non-conformité au droit européen.

Il était plus particulièrement reproché au DAR de n’avoir prévu qu’un système de ratification des permis délivrés, sans qu’un dossier de demande complet, comprenant entre autres une évaluation des incidences, ne soit soumis à une véritable procédure législative au fond, à l’occasion de laquelle les parlementaires auraient pu instruire la demande, imposer des modifications, etc.

Aujourd’hui, la notion de permis parlementaire est réintégrée dans le projet de CoDT, en tenant compte des enseignements de l’arrêt de la Cour Constitutionnelle. Le nouveau régime prévoit une première instruction de la demande par le Gouvernement, lequel adresse ensuite une proposition de permis au Parlement, accompagnée d’un dossier complet. Le Parlement dispose alors d’un délai de soixante jours pour refuser, octroyer ou modifier le permis.

Le projet de CoDT répond donc, a priori, aux critiques de la Cour Constitutionnelle. Reste à voir comment les requérants qui avaient attaqué le DAR réagiront.

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